Echelles, escabeaux, bâches, pots de peinture et de pinceaux : dans le parking en sous-sol de l'association, à Cergy-Saint-Christophe, dans le Val-d’Oise, Naouel, Zina, Nadia et deux autres collègues s'activent pour préparer le camion, qui le lendemain, va emporter le matériel sur un chantier à Versailles.
Toutes participent au chantier d'insertion, « les embellisseuses d'avenir ». Le projet a été créé par l'association "Du côté des femmes!". Héritière de la Maison des femmes ouverte à Cergy en 1983, elle milite depuis 40 ans pour l'autonomie et l'émancipation des femmes.
A 49 ans, Nadia n'avait jamais travaillé dans le BTP mais plutôt auprès des enfants dans les cantines des écoles. Elle a été contrainte de s'arrêter. Comme ses collègues, elle ne s'épanche pas. Tout juste confie-t-elle que son mari a des problèmes de santé et qu'elle a besoin de « ce travail qui donne confiance en soi ». Allocataire du RSA, adulte handicapée, chômeuse de longue durée, victime de violences conjugales, les « embellisseuses » ont des profils variés, mais « un point commun: elles ont toutes galéré », explique Mariam Baraka, responsable du chantier d'insertion.
Ici, l'idée est de « lever les freins à l'embauche de ces femmes, de leur donner les codes pour entrer sur le marché et s'y faire une place à parité avec les hommes ». Le tout avec un professionnalisme revendiqué. « Le client attend de nous un travail sans reproche », rappelle avec insistance l'encadrante du chantier d'insertion, Christelle Ruscade à son équipe. « Un petit dépassement de peinture, ce n'est pas possible ».
Mais les « embellisseuses » sont aussi « un travail de déconstruction des stéréotypes », relève Mme Baraka, glissant malicieusement « qu'avec notre structure d'insertion, 100% féminine et spécialisée dans le BTP, on cumule les préjugés ».
Les métiers du BTP demeurent fortement « masculinisés » avec une proportion d'au moins 65 % d'hommes, rappelle l'Observatoire des inégalités. Le secteur connait pourtant de fortes tensions de recrutement. Comme un clin d'œil, sur le mur du bureau de la responsable des « embellisseuses », est accrochée la photo d'une paire de chaussures de sécurité avec cette légende: "Existent aussi en 36".