« Constatant qu’on n’était pas tellement raccord avec les annonces du gouvernement sur l’aspect économique nous avons souhaité demander au CSA de mener une enquête réelle et précise sur la relance de l’activité des TPE », explique Marc Sanchez, président du syndicat des indépendants (SDI) qui anticipait de tels résultats.
Pour le syndicat l'enquête réalisée par l'institut de sondage CSA entre le 2 et le 19 novembre (avant même le début de la 5e vague de Covid et l’apparition du nouveau variant Omicron) auprès d'un échantillon représentatif des 5,5 millions d'entreprises de moins de 10 salariés, tous secteurs confondus, « déconstruit chacun des éléments de langage des Pouvoirs publics fondés sur une approche macroéconomique très éloignée des réalités de terrain ».
44 % des sondés jugent leur activité en baisse
Le but était en effet de faire un point sur la situation économique et sociale des TPE et d’étudier l’état d’esprit de leurs dirigeants un an et demi après le début de la crise sanitaire qui les a « fortement impactés ». Le constat n’est pas reluisant.
« Ce qu’on voit d’emblée est qu’on est face à des TPE sous tension en cette fin d’année », annonce Quentin LLewellyn, représentant du CSA.
Moins d’un tiers des dirigeants de TPE observe une reprise économique significative de leur activité depuis juin 2021, un ressenti d’autant plus fort dans les secteurs des Cafés-Hôtels-Restaurant et du commerce.
Pire, 44 % des dirigeants de TPE interrogés constatent que leur niveau d'activité de 2021 est en baisse par rapport à la même période de 2019, lorsqu'il est au mieux stable pour 38 % d'entre eux.
S'il est indéniable que la situation économique française se redresse cette année grâce notamment aux mesures de soutien gouvernemental, cette enquête qui met le focus sur les structures de moins de 10 salariés, soit 96 % des entreprises en nombre représentant 9,5 millions de travailleurs, révèle la dévitalisation inquiétante du tissu économique et social de proximité.
« Quand on nous explique que l’activité économique est florissante depuis le mois de juin c’est faux, ce n’est pas le cas chez nos adhérents », dénonce Marc Sanchez.
Ce dernier critique un plan de Relance « trop axé PME et grands groupes » et qui ne contient « pas de mesures adéquates pour les TPE », hormis le chèque de numérisation de 500 euros.
Trésoreries en forte tension malgré les PGE
Chiffres d'affaires en baisse et augmentation des charges conduisent logiquement à des problématiques de trésorerie pour près de la moitié des TPE, dont 19 % les jugent critiques ou importantes.
Au 12 novembre 2021, les 3/4 des TPE avaient déjà engagé les fonds versés par leur PGE donc elles ne disposaient plus vraiment de liquidités à court terme mais plutôt d’une dette accumulée. Un point majeur pour le SDI selon qui le PGE « n’est qu’une dette qui paie des charges » mais ne permet pas de véritablement relancer son activité. Un allongement de la durée de remboursement du PGE serait ainsi « souhaitable » pour 55 % des sondés, et même « vitale » pour 29 % d’entre eux.
Si les sondés admettent avoir des problèmes de trésorerie, ils se disent néanmoins majoritairement confiants pour l’avenir ce qui peut paraître contradictoire. C’est toutefois logique selon Marc Sanchez pour qui « les dirigeants de petites entreprises adoptent un optimisme de nécessité car, pour beaucoup d’entre eux, leur boîte c’est toute leur vie ».
« L’enquête montre également que ces difficultés économiques que les dirigeants de TPE rencontrent rejaillissent sur leur situation financière personnelle pour 42 % d’entre eux », déplore Quentin LLewellyn.
Les TPE sont dans une situation délicate selon Marc Sanchez même s’il fait « attention à ne pas être le Cassandre qui annonce des choses qui ne se passent pas » comme le mur de faillites et la baisse du moral des dirigeants. Il note cependant un nombre très élevé de radiations : 313 000 entreprises ont arrêté leur activité cette année (entre le 1er janvier et le 31 octobre selon Infogreffe, donc hors entreprises artisanales qui ne sont pas au Registre du commerce), soit 30 % de plus que l’année dernière.
« Les faillites on ne les voit pas parce que les entrepreneurs arrêtent leurs activités avant, et c’est là qu’est tout le problème », souligne Marc Sanchez qui regrette que les chiffres des radiations n’apparaissent pas dans les baromètres des procédures collectives.
Fortement affectés par une baisse continue de trésorerie et de chiffre d'affaires ainsi que des finances personnelles délicates, beaucoup de dirigeants de TPE et d’indépendants songent à cesser leur activité à bref délai, dont 16 % d’ici la fin de l’année.
Le SDI tire la sonnette d’alarme
Pour le SDI, cette enquête est un « coup de semonce » pour les Pouvoirs publics en responsabilité, mais aussi un appel lancé aux candidats à l’élection Présidentielle.
Souhaitant savoir dans quelle mesure les sujets abordés pendant la campagne concernent ou préoccupent les dirigeants des petites entreprises et ouvrir le dialogue, le SDI vient de lancer la "Plateforme des TPE". Cet outil de communication spécifique va compiler les doléances des dirigeants et les mettre en contrepoint avec les programmes de chaque candidat.
« L’idée est de créer ce lien pour qu’on ait enfin des candidats et le gouvernement actuel qui puissent mettre en place des politiques à destination privilégiée des très petites entreprises », précise Marc Sanchez.
« Il est impératif que, enfin, les entreprises de moins de 10 salariés, soit 96 % des entreprises de ce pays et leurs 4,9 millions de dirigeants, soient prises en compte en tant que telles dans les programmes », conclut-il.