Depuis un an et demi et la décision-couperet d'Emmanuel Macron d'abandonner le projet de méga-complexe Europacity, le doute planait sur l'avenir de l'Est du département francilien, en proie à un taux d pauvreté de 17% et mal relié à l'aéroport voisin de Roissy, gros pourvoyeur d'emplois. En déplacement dans le Val-d'Oise, le Premier ministre a tranché : la gare controversée de la ligne 17 du métro du Grand Paris sera bien réalisée sur le Triangle de Gonesse, enclave verte de 700 hectares dont 280 sont potentiellement urbanisables. Sa mise en service est prévue en 2028.
Cette annonce fait partie des 17 mesures pour relancer ce département d'environ 1,2 million d'habitants. Une extension du marché de gros de Rungis, une administration publique et une cité scolaire internationale devraient aussi s'installer sur une ZAC de 110 hectares sur le Triangle, a annoncé M. Castex, vantant des « projets porteurs, très structurants ». La ligne 17 "a une vocation résolument sociale et économique" pour faciliter l'accès à l'emploi, « alors que le taux de chômage des jeunes dépasse les 35 % dans l'Est de ce département », souligne la Région Ile-de-France. « On attend ça depuis longtemps. Ici c'est la galère pour aller à Roissy, à vol d'oiseau c'est 7km, en train 1h20 », lâche William Camara, qui vit à la Fauconnière, quartier populaire de Gonesse rythmé par le survol des avions. « S'il y a un vrai plan, c'est bien. Les citoyens ont besoin de mesures concrètes, de perspectives », note Ronald Nicolas, 30 ans, qui travaillait dans l'hôtellerie à Roissy avant la crise de la Covid.
Des investissements dans les transports en commun et la sécurité sont également inclus dans ce plan qui fera l'objet d'un « comité de suivi régulier » avec Matignon. Dans les rangs des élus locaux, échaudés par le projet avorté d'Europacity, l'heure est au soulagement général. « C'est un combat de plusieurs années mené par les acteurs du territoire qui est récompensé », s'est félicité Pascal Doll, président de l'agglomération Roissy Pays de France. « C'est le territoire qui a été entendu », encense Jean-Pierre Blazy, le maire de Gonesse. « Enfin, on est dans cette approche équilibrée » salue-t-il. « Ce qui a été rejeté aujourd'hui, c'est l'intégrisme écologique ou l'écologie punitive. »
« Demi-tour »
Le tacle non dissimulé s'adresse aux défenseurs de l'environnement, qui ont fait du Triangle de Gonesse un de leurs chevaux de bataille, jusqu'à installer pendant dix-sept jours sur le site la première ZAD (zone à défendre) d'Ile-de-France. Avec l'abandon d'Europacity, les Pouvoirs publics « étaient au milieu du gué, là ils font demi-tour et reviennent sur l'idée qu'il faut à tout prix urbaniser le Triangle », fustige Bernard Loup, le président du Collectif pour le Triangle de Gonesse (CPTG), qui soutenait un contre-projet agricole au lieu d'une gare « en plein champs ».
Pour dénoncer des « annonces absurdes », une poignée de militants dont M. Loup, empêcher d'accéder au Triangle, se sont assis par terre en signe de protestation, sous bonne garde des forces de l'ordre, alors que le cortège du Premier ministre se déplaçait sur les lieux. « Ce que nous mangeons ne provient qu'à 2% de ce que nous produisons en Ile-de-France : il y a un enjeu majeur à préserver ces terres », a réagi Clémentine Autain, candidat aux prochaines régionales. « Même masquée sous des intentions a priori louables, on reste sur de l'artificialisation scandaleuse de terres nourricières », en désaccord avec les engagements de la France en faveur du climat, a déploré Julien Bayou, secrétaire national d'EELV et également candidat à cette élection.
En guettant l'apparition de Jean Castex lors de sa visite, Marie-Claude, 71 ans, résumait les enjeux : « Si ça peut donner du travail ici, c'est très bien, mais c'est aussi agréable d'avoir de la verdure, de ne pas toujours être dans le béton. »
Avec les annonces de Castex, le territoire du Val d'Oise « prend sa revanche »
Une gare de métro et des bâtiments pousseront bien sur les terres du Triangle de Gonesse a confirmé dernièrement Jean Castex, une décision « emblématique » et « équilibrée » pour des responsables du Val-d'Oise mais un sérieux revers pour les défenseurs de l'environnement.

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